Février : 28 jours seulement, mais pas un de perdu !

Frustrée de n’avoir pu réunir tous les participants lors du 1er Atelier du 27 janvier dernier, l’équipe de Social Demain a scindé la Promo’ en “micro-groupes” de 5 à 7 personnes, pour des échanges informels tout long du mois. Objectif, croiser les regards, et apprendre à se connaître un peu mieux les uns les autres, autour d’un croissant, d’un déjeuner ou de quelques verres.

Au rayon des rencontres du mardi et du jeudi, là aussi un programme chargé, pour des intervenants et thématiques très variés. Des journalistes, comme Valérie LION (Bayard Presse, lettre Sommes Toutes), accompagnée le jeudi 3 de l’auteure et conférencière Laetitia VITAUD pour parler de la place des femmes dans le monde du travail ; Rodolphe HERDERLÉ, fondateur du média participatif MiroirSocial, interrogé cinq jours plus tard sur la question PME, un dialogue social sans syndicats ? ; ou encore David ROUSSET, de la revue éphémère Deux mille vingt-deux – La fabrique de la présidentielle, venu le 24 indiquer dans quelle mesure il était possible… de prévoir le résultat des présidentielles !

Le jeudi 10 au soir, c’était le politologue Xavier CRETTIEZ, coauteur d’une étude inédite sur les détenus incarcérés pour terrorisme islamiste, qui a pu parler de cette catégorie bien particulière aux participants de la visio. Enfin, des avocats sont aussi venus, à une semaine d’intervalle, se frotter aux questions de la promo : Me Bruno COURTINE, associé fondateur de Vaughan Avocats, qui se demandait le 15 « Où [était] le point S dans la RSE ? », puis Me Rachid BRIHI, avocat travailliste, présent le 22 pour dresser ni plus ni moins qu’un état des lieux des rapports entre le droit et la justice sociale.

Et pour mars ? Tout ce qu’on peut dire, c’est que là encore, les choses n’ont pas attendu le 2 du mois pour démarrer !

Groupe VYV : « Des effets-miroirs passionnants »

Cécile LASSUS-CARROIS

Depuis fin 2019, le Groupe VYV, 1er acteur mutualiste de santé et de protection sociale en France, est activement impliqué auprès du dispositif Social Demain. Ainsi, Cécile Lassus-Carrois, sa DRH, a pu observer les premières promotions, en tant que représentante engagée d’une composante essentielle de l’Economie sociale et solidaire. Elle répond ici, à son tour, à nos quatre questions.

Pourquoi vous êtes-vous intéressée dès le départ à Social Demain ?

L’initiative m’a tout de suite parlée, dans la mesure où nous cherchons à réinventer un certain nombre de modèles – notamment ceux du travail et de l’entreprise. Il nous faut préparer la relève sur ces sujets, que les structures ont encore du mal à faire évoluer. Ainsi, cette idée d’accompagner plus particulièrement des jeunes qui ont une volonté de s’engager sur ces questions, pour les préparer à ces transformations, m’est apparue lumineuse. Aujourd’hui, même pour ceux chez qui cette volonté est profondément ancrée, le fait d’être issus des mêmes formations par exemple les empêche parfois de révéler tout leur potentiel. Donc contribuer à enrichir leurs réflexions, les faire se rencontrer ne peut qu’être bénéfique.

Quelle est la valeur ajoutée du Groupe VYV dans ce dispositif ?

Par sa raison d’être, tout d’abord : le Groupe VYV, groupe de protection sociale qui travaille sur la santé, sait à quel point le travail constitue un déterminant de santé fondamental. Quand on s’appelle « entrepreneur du mieux-vivre », on ne peut passer à côté de ce type de questions. En outre, nous sommes un groupe mutualiste, soit un modèle d’entreprise qui, grâce à ses ingrédients très intéressants, me semble faire complètement sens par rapport à cette nécessaire réinvention. Parmi ces ingrédients, une gouvernance non capitalistique – qui attire beaucoup les jeunes, comme l’atteste la grande attractivité de l’ESS en général.

D’après votre expérience, notamment dans le travail de sélection des membres de chaque promo, dans quel sens ces dernières évoluent-elles ?

Les profils ont un peu évolué d’une promotion à l’autre, notamment parce qu’au début, le dispositif n’était pas connu. Aujourd’hui, ceux qui arrivent ont entendu parler de Social Demain (par le bouche-à-oreille notamment), et sont donc plus “construits” dans leurs discours et projets, plus “préparés” quand ils intègrent leur promotion. Je suis toujours bluffée et interpellée par les parcours et engagements de certains. Cela crée des effets-miroirs proprement passionnants.

Quelle est, selon vous, LA question sociale du moment ?

D’abord, la question du rapport au travail, de la place du travail dans la vie, au sortir d’une crise qui a pas mal questionné les modes de fonctionnement. “Hybridation” du travail, fragmentation entre ceux qui peuvent travailler hors proximité (et le font en pleine conscience) et ceux qui n’ont pas la capacité de télétravailler, problématiques et risques induits par le télétravail sur le long terme… Avec un champ des possibles restreint, ne risque-t-on pas, par exemple, de réduire son employabilité, voire de renforcement l’isolement de certains ? Et comment doit se positionner l’entreprise dans ce contexte ?

Ensuite, la question environnementale, bien sûr. Là encore, quel est le rôle de l’entreprise, à la fois en tant qu’actrice et de manière plus indirecte, dans sa capacité par exemple à faire bouger les comportements de ses collaborateurs ? En effet, si l’on passe X heures par jour au travail, comment ignorer que l’entreprise constitue un lieu d’apprentissage et d’enseignements, sur ce terrain aussi ?

Syndicalisme : vestige d’hier ou espoir demain ?

Courant janvier, les entretiens individuels menés avec l’ensemble des membres de la troisième promo avaient permis d’esquisser un premier « portrait de groupe », présenté au soir du 27 à tous les participants. Parmi ces multiples enseignements, les questions concernant le syndicalisme ont donné lieu à des avis très divers, qu’il nous a semblé utile de creuser.

Que pensent, en 2022, les jeunes de la troisième promo de Social Demain, nés après 1985, du syndicalisme, apparu à la fin du XIXème siècle ? A ce sujet, ils se positionnent sur un axe allant d’un enthousiasme encore bien vivace à une forme de sévère constat de décès, en passant par un regard teinté d’ennui ou d’incompréhension… Bref : ils apparaissent, en tout cas, bien en phase avec les réactions de l’ensemble de l’opinion publique !

Des avis corrélés au niveau de proximité avec les syndicats

29 membres de la promo entretiennent une relation avec le monde syndical, soit en tant qu’anciens syndicalistes (souvent étudiants), soit dans le cadre de leur activité professionnelle actuelle (syndiqués, en lien avec les centrales syndicales ou engagés d’une manière ou d’une autre dans le dialogue social). Pour autant, l’impression générale qui se dégage des entretiens, c’est que le syndicalisme constituerait un engagement respectable… mais parfois peu en phase, soit avec la société en général, soit avec cette génération en particulier.

Plus précisément, 60% d’entre eux émettent des avis mesurés. Ils se partagent entre ceux – au nombre de 16 – qui n’y sont pas couramment confrontés, ou ne l’ont pas été dans leur passé, et adoptent donc une posture que l’on pourrait qualifier d’indifférence coupable mais polie ; et ceux – au nombre de 14 – qui les pratiquent au quotidien, et affichent une forme de soutien obligé. Les premiers confessent ne pas trop s’y intéresser, quand les seconds donnent parfois l’impression de réciter une leçon bien apprise… tout en se montrant particulièrement bien informés sur le sujet quand on le creuse avec eux. En effet, sincèrement attachés au concept de démocratie sociale, ils n’ignorent rien, par exemple, des difficultés auxquelles les syndicats se heurtent aujourd’hui, et de la schizophrénie qui peut régner en leurs seins. Ils oscillent, ainsi, entre tendresse à leur sujet et critiques légitimes quant à leur fonctionnement.

Avocats vs contempteurs

De manière moins pondérée, le reste des membres de la promo, minoritaires, émettent des discours tranchés, qui polarisent leur vision du syndicalisme. D’une part, les enthousiastes nourrissent leur plaidoyer en faveur des syndicats soit d’une analyse des divisions sociales à l’œuvre (qui les rendent indispensables si l’on espère “faire bouger” les employeurs), soit d’observations empiriques liées à leur trajectoire personnelle (ils l’ont constaté par eux-mêmes : les syndicats sont utiles).

Du côté, enfin, de la poignée des jeunes interrogés exprimant un rejet fort des syndicats – soit, les plus sévères à leur égard -, leur défiance se porte soit sur la culture de la grève et du conflit “pour le conflit”, qui leur apparaît stérile, soit sur le sentiment qu’ils sont désormais totalement dépassés, ringardisés, sans espoir de retour.

Du diagnostic… à l’ordonnance

Interrogés sur les pistes et marges de progression du syndicalisme tel qu’il existe aujourd’hui, la grande majorité des membres de la promo s’accorde sur deux points : pour survivre ou retrouver leur poids d’antan, les syndicats doivent se rajeunir et se féminiser. Se moderniser, aussi, en proposant des tutos, via des plateformes comme Tik Tok ou Youtube ? Pourquoi pas. Démontrer, en tout cas, qu’ils peuvent rendre concrètement des services aux salariés, les protéger et les défendre, tout en dissipant les ressentis négatifs dont sont encore bien souvent victimes les représentants du personnel.

Par ailleurs, d’autres pistes ont émergé. Celle, par exemple, d’une répartition des actions entre les différentes organisations syndicales, en fonction de leurs compétences propres. Soit, « collectiviser des causes », selon l’expression-même de l’un d’entre eux, et veiller à ce que le projet prime sur les appareils. Ou encore, s’interroger sur la distinction nette, opérée aujourd’hui, entre adhérents et non-adhérents, pour imaginer des statuts hybrides, ou des services proposés de manière plus universelle.

Tout ceci, sans doute, à la fois pour conforter sinon réanimer l’action des syndicats… et éviter, surtout, que ces derniers ne se fassent déborder, comme c’est déjà le cas aujourd’hui, par les tenants d’actions plus radicales et moins cadrées…

Ils nous rejoignent !

De nouveaux partenaires, en lien avec chacune des trois premières promotions, viennent de rejoindre le programme Social Demain, :

  • La Direction du dialogue social d’EDF, dont l’un des juristes, Maxence Deguilhem, est d’ores et déjà membre de la troisième promo’ (2022),
  • Learn Assembly, entreprise d’un lauréat de la deuxième promo’ (2021), Antoine Amiel, spécialisé dans la formation (et la formation de formateurs),
  • et SoManyWays, entreprise d’une lauréate de la première promo’ (2020), Anaïs Georgelin, qui aide les entreprises à repenser leurs organisations, les salariés à effectuer leurs transitions professionnelles.